« Y entro a Buenos Aires buscando su perfil más agudo entre sus barcos, sus bandoneones y los hogares limpios del pueblo donde el tango abre en el crepúsculo sus mejores abanicos de lágrimas. » Federico Garcia Lorca.
Dans ces quelques mots, cités par Horacio Ferrer dans « El tango: arte et misterio » ( Losada, Buenos Aires, 2013. http://www.editoriallosada.com.ar), le poète espagnol approche la complexité fascinante de Buenos Aires, celle qui nous y attire pour la septième fois. Car revenir dans la capitale fédérale, c’est certes être » un pèlerin du tango », mais c’est aussi vivre pendant quelques temps au rythme d’une cité qui ne dort jamais, qui multiplie les événements en tous genres et dont les facettes sont nombreuses et fascinantes. C’est une ville qui, issue de l’immigration, est un extraordinaire mélange social, économique, politique, architectural et culturel. Et qui va bien au delà du tango… Chacun l’appréhende sans doute à sa manière, mais pour moi c’est une des villes que j’approche et quitte avec une certaine émotion. « Mi Buenos Aires Querido » ?

Le port de Buenos Aires et les terrasses des cafés la nuit, toujours animées…
Et c’est pourquoi nous préparons chaque voyage avec soin, pas seulement dans les détails matériels que tout un chacun peut résoudre facilement par internet en s’y prenant suffisamment tôt: avion et autres transports, hébergements, tourisme dans le pays… Mais surtout, comme les pèlerins, dans le sens religieux du terme, nous nous préparons mentalement, culturellement et même physiquement à un autre état d’esprit, à un autre rythme, à une curiosité aiguisée et à des rencontres fortuites… en sachant que l’hospitalité des Argentins, et tout particulièrement des portègnes, sera à la hauteur de nos attentes. Dans les semaines qui précèdent le départ, nous renouons tout naturellement par internet avec de nombreux amis et rencontres, en sachant que les retrouver sera naturel et chaleureux.
Et, comme pour tous nos voyages, nous nous imprégnons de la littérature du pays ou sur le pays. Cette fois, je recommande » Jorge Luis Borges » une grosse compilation d’articles dans » Les Cahiers de L’Herne », à lire avec patience par petits morceaux, pour mieux comprendre un auteur adulé par les Argentins, mais difficile. » Disparition et témoignage » d’Alice Verstraeten (Presse de l’université Laval, www.editions-hermann.fr) traite des Mères de la Place de Mai pendant la dictature, moment historique fort et dramatique, que nous avons approché de plus près en 2013, notamment en visitant le musée installé dans l’ESMA, camp militaire, lieu de multiples disparitions. Dans cette Amérique du Sud où la démocratie se bat encore, tout bouge très vite et le travail de mémoire est remarquable et se transmet aux jeunes générations. Et nous nous demandons parfois quels drames se cachent dans chaque famille et peut être dans le passé momentanément enfoui des danseurs. Soyez attentifs aux plaques discrètes apposées sur les maisons ou les trottoirs qui ont vu se dérouler des moments difficiles, pour vous rendre compte que l’histoire sinistre est encore là…

La Place de Mai, centre politique de toutes les contestations et la Casa Rosada, siège officiel de la Présidence.
Et puis, il y a bien sûr le tango et l’envie d’encore mieux s’en imprégner pour approcher au plus près l’âme argentine. » El tango es un estilo de vida. Hay que haber sufrido y vivido intensamente para comprederlo. Es una música que recién a los treinta años se comprende, cuando una ha pasado por problemas. » Jorge Palacio, repris par Horacio Ferrer dans l’ ouvrage déjà cité plus haut, qu’il faut lire pour mesurer l’influence diversifiée de notre danse favorite et l’histoire, revisitée par le poète, de sa riche évolution. D’un abord plus facile, parce qu’il est traduit en français, le roman de Arturo Perez-Reverte, » Le tango de la Vieille Garde « ( Seuil 2013), récemment en livre de poche, permet de se plonger dans l’atmosphère de cette époque. Car en ce qui concerne le tango, l’ambiance, notamment dans les milongas, est pour beaucoup dans la fascination qu’il exerce sur les danseurs du monde entier.
Revenir à Buenos Aires, ce peut être aussi trouver la porte pour une excursion dans le pays dont l’attrait touristique est exceptionnel, notamment avec la superbe Cordillère des Andes. A ver…