La Tipica “ SANS SOUCI” au salón PLAZA BOHEMIA .

      A l’invitation de Gabriela Laddaga, organisatrice et DJ de La Matiné de los Lunes, le 7 décembre 2015 était un “ especial feriado” à la salle bien connue de Plaza Bohemia ( Alsina 2540) où se déroulent des milongas prisées, et animées avec talent par des femmes dynamiques ( Elsita, Adriana…). Gabriela y avait en effet invité la Orquesta Tipica “Sans Souci” et son chanteur Walter “ Chino” Laborde. Cet orchestre, créé en 1999, avec le souci de retrouver et perpétrer les styles musicaux de l’âge d’or,  prend soin de ne pas galvauder sa réputation et se présente dans des occasions choisies. Depuis nos multiples séjours à Buenos Aires, nous avons eu l’occasion de l’entendre trois fois seulement et sa discographie reste restreinte. Quelques jours avant, il animait la Milonga de l’Ambassade de France… mais nous n’étions pas invités!  Celle du 7 décembre fut une superbe soirée, non seulement parce qu’il y avait beaucoup de monde dans une milonga qui tournait parfaitement, avec de bons et beaux danseurs, mais parce que la seule écoute de l’orchestre, dont le jeu tout en finesse autour de solos successifs des instruments ou du chanteur, est un régal. D’ailleurs la public a attendu le 7ème morceau pour danser, à l’invitation du chanteur, et l’écoute était quasi religieuse, dans une appréciation du jeu des musiciens et de la voix du chanteur. C’est à souligner et à rappeler au public européen, car on voit toujours quelques danseurs, assurément des marathoniens du tango, qui se lancent sur la piste dès les premières notes de l’orchestre, et c’est, à mon sens, un manque de respect pour ce que représente le travail d’un orchestre. 

L’orchestre “Sans Souci” est composé selon le modèle traditionnel de la tipica: 4 bandonéons, 4 violons, 1 contrebasse, le piano et le chanteur. Ce jour là, il manquait un bandonéon, le plus âgé des titulaires de ce pupitre. Certains des bandonéonistes jouent dans d’autres formations, mais on y remarque en particulier un japonais talentueux dont on dit qu’il est venu en Argentine pour se consacrer à cet instrument où il excelle.

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              Le pupitre des bandonéons et le jeune couple qui a dansé pour la salle .

L’orchestre a pris ce nom en hommage d’abord à un cabaret parisien “ Le Sans Souci”, qui avait été ouvert au début du 20ème siècle, rue Caumartin à Paris, par Bernard Citroën, un fêtard notoire. Il s’appela ensuite “Le Jardin de ma Soeur”. On y retrouvait dans un thé dansant des danseurs plutôt huppés, pratiquant, entre autres, le tango. Le compositeur Juan Carlos Cobian le fréquenta car c’était un dragueur déclaré aux aventures féminines mouvementées. En reconnaissance pour ce lieu ( et ses conquêtes ?), il composa, en 1917, avec Enrique Delfino un tango du même nom. Miguel Calo l’interpréta et son enregistrement devint mythique. L’orchestre a d’ailleurs la manière de ce chef d’orchestre et c’est la seconde raison du choix  de son nom. Je recommande aux lecteurs 3 sites qui lui permettront d’aller plus loin sur le tango à cette époque, les cabarets, le compositeur:

♥ La Bible du Tango: http://www.bibletango.com régulièrement enrichi par André Vagnon. ♥ La Milonga Ophelia : http://www.milongaophelia.wordpress.com où Sacha a rédigé un article très détaillé sur les lieux de danse parisiens entre 1920 et 1955. ♥ Marseille Tango: www. marseilletango.fr où Dominique Lescarret, enseignant de tango a construit un site de formation et d’information. 

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                                        Le cabaret sur un cliché de l’époque.

Le chanteur Chino Laborde s’est intégré à l’orchestre depuis plusieurs années, après avoir collaboré également avec l’orchestre “La Fernández Fierro” qui joue plutôt dans le style de Pugliese. D’une taille imposante et avec une posture de matador, il développe une voix puissante et expressive, sans effet excessifs et qui fait vivre le tango, même quand on n’en déchiffre pas les paroles. Mais ayant été acteur, dans des films et sur scène en récital, il sait jouer de sa stature pour faire de beaux effets de manche et de physionomie. On peut le voir et écouter sur You Tube et lire sa biographie sur le site : ♥ www. todotango.com . Ce soir là il a donné sa version de “ Rincon de Paris” comme un hommage aux danseurs français présents dans la salle, ce qui nous a permis d’échanger quelques mots avec lui… et de constater que s’il est éminemment sympathique, il est d’une taille impressionnante.

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              Quand des DJs se rencontrent… et  Hélène avec Chino Laborde.

Quant au tango “Sans Souci”,  s’il était considéré comme très dansant selon les chroniques de l’époque et devenu emblématique dans la version de Calo, on ne l’entend guère dans nos milongas car il comporte des effets musicaux parfois déroutants. Vous pouvez l’écouter sur le site de Todo Tango recommandé plus haut. Par contre, je n’ai pu trouver le texte, ni dans mes anthologies personnelles, ni sur les sites et je suis preneur si un de mes lecteurs l’a en réserve. 

Pour conclure sur cette soirée du 7 décembre, elle fut d’une ambiance exceptionnelle, très stimulante par son dynamisme portègne : danser avec un orchestre, c’est autre chose, qui ne met pas en cause la compétence des DJs, mais ceux ci sont conditionnés par la teneur d’un enregistrement, sans pouvoir le moduler en quoi que ce soit. L’orchestre, lui, traduit son interprétation, dans son état d’esprit et son émotion du jour et cela dépend de la réceptivité de la salle. Ce jour là, elle était totalement acquise : merci à l’orchestre, au chanteur et à Gabriela.  

par chabannonmaurice

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