A L’ACADEMIA NACIONAL DEL TANGO : ACTE 3.

 

Le troisième acte interviendra deux jours plus tard, à nouveau à l’Academia, dans le grand salon des Angelitos où un hommage est rendu à Armando Pontier, bandonéoniste, chef d’orchestre et compositeur. Ce genre de manifestations rythme le calendrier au fil des anniversaires, commémorations et autres événements significatifs. Il est suivi, non seulement par des académiciens émérites, mais aussi par des connaisseurs, des membres de la famille des personnalités honorées et des responsables de revues. Le déroulement est quasiment toujours le même avec un tango rituel d’ouverture, suivi d’une introduction de présentation et de diverses interventions ou discussions.

Des pauses illustrées par des musiciens, danseurs, récitants viennent souligner et magnifier le propos.
Le tango rituel choisi fut « Trenzas », un de mes morceaux préférés. Après un documentaire biographique et culturel sur Armando Pontier, un bandonéoniste et un pianiste jouèrent plusieurs tangos pour montrer le style du maestro, le pianiste ajoutant quelques phrases de sa voix. Le bandonéon fut d’une belle expressivité, au point de s’éloigner un tant soit peu de la composition initiale pour lui donner toute sa vigueur. Deux autres chanteuses, très théâtrales, ajoutèrent un tonus vivifiant à la soirée, plus que le couple de danseurs dont l’évolution dans un espace restreint restait académique, avec une tenue un peu trop dénudée de la danseuse pour être dans le bon ton… Mais l’ensemble était de haute tenue, comme les plenarios auxquels nous avons eu l’occasion d’assister dans nos voyages précédents. L’un d’eux m’avait permis de rencontrer Horacio Ferrer, grand poète mais homme d’abord très facile, à qui j’avais remis mon recueil de nouvelles. Et j’avais conçu pour lui une grande admiration qu’une autre rencontre, lors de la soirée d’anniversaire de Copes, avait renforcée quand il y récita son poème « Existir ». Je me suis ensuite lancé dans la découverte des letras qu’il avait écrites dans sa période de collaboration avec Piazzolla. Il reste pour moi, avec Manzi, l’un des auteurs de génie des lettres de tango.

                

Concernant Armando Pontier, nom de scène de cet artiste né en 1917 et mort en 1983, il fut d’abord bandonéoniste parce que son papa lui avait acheté secrètement un bandonéon d’occasion, lors d’un voyage à Buenos Aires, histoire que j’avais imaginée aussi pour le héros de mon récent roman, Feliciano. Il apprit vite avec des maîtres locaux, avant de jouer plus tard avec Miguel Caló en admirant aussi A. Troilo et H. Stampone. Il crée son propre orchestre Francini-Pontier, avec Enrique Francini, violoniste de talent, et compose très vite lui- même des tangos dont  » Cada dia te extraño mas », « Che papusa oi », « Pichuco » et « Trenzas », quelques-uns des plus connus par les danseurs. Dans un entretien diffusé dans cette soirée et qui date de 1979, il précise qu’il a cherché de nouveaux chemins pour la composition et le jeu d’orchestre, sans quitter la tradition et la supériorité des années 40. Il aurait pu explorer d’autres types de musique mais il disait sentir la nécessité de pouvoir exprimer le tango pour jouer, et ses interprétations sont effectivement mélodiques. Alors, précisait-il, le tango entre par l’oreille, parcourt tout le corps jusqu’aux pieds…Cet homme n’est pas toujours connu dans nos milongas et mérite qu’on lui donne sa juste place. C’était le but de la soirée.

On peut voir, aux trois actes que je viens de relater, la diversité et la richesse du travail effectué par l’Academia Nacional del Tango, un organisme qui n’est pas figé et qui perpétue l’idée que cette danse est en continuelle évolution à partir d’un passé qui sert de terreau fécond à un présent et un futur qui s’écrivent sans cesse. Je ne peux que conseiller aux danseurs qui se rendent à Buenos Aires d’aller y sentir l’âme du Tango.

par chabannonmaurice

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