Si la découverte de lieux nouveaux est toujours possible, avec le renouvellement propre à une grande ville qui bouge toujours, la rencontre avec des personnalités diverses, célèbres ou plus anonymes reste parmi les moments marquants, et lors de notre dernier voyage nous avons été comblés sur ce point. En effet, en prolongement ou en dehors de nos rencontres à l’Academia Nacional del Tango, nous avons eu l’occasion de côtoyer diverses personnes intéressantes et souvent liées au tango et à la culture argentine.
La personnalité majeure que nous avons rencontrée, est sans nul doute Oscar Fresedo, neveu d’Osvaldo Fresedo, le reconnu bandonéoniste, chef d’orchestre et compositeur ( 1897 – 1984 ), auteur de la musique de nombreux tangos sur lesquels nous dansons ( « Arrabalero », » El Once », » Sollozos » ou « Vida mia »… ). Oscar perpétue, avec une énergie communicative, une lignée familiale liée au tango, car son père Emilio ( 1893-1974 ), le frère d’ Osvaldo, était violoniste et auteur de letras. On lui doit en particulier la musique et le texte de « Paseo de Julio », chanté par Carlos Gardel. Oscar a repris le flambeau de la lignée et a composé des textes pour son oncle, dont l’orchestre a eu une longévité et une célébrité remarquable. Mais il a travaillé avec des compositeurs divers, dont Piazzolla, toujours à des letras assez lyriques et plutôt pour des tangos cancións. Nous l’avons rencontré d’abord lors d’un repas commémoratif organisé par le groupe du monument au tango ( voir mon article du 28/11/2017 ), puis il nous a accompagnés le même jour, lorsque j’ai présenté mon roman à Gabriel Soria : il faisait partie du cercle des invités, intrigué par notre approche de la culture argentine. Et, en attendant le Président de l’Academia, il a été notre guide dans le musée pour nous présenter lui-même la vitrine consacrée à sa famille et commenter les documents qui y figurent. Quel moment, mais ce n’était pas fini !…
Car le soir il a voulu aussi être avec nous au Bar « Sur », où le patron, Ricardo Montesilva nous avait invités pour une soirée spectacle, prévue pour les touristes, ce qui n’est pas notre recherche habituelle. Mais il faut reconnaître que, dans ce bar intimiste et historique, la soirée était de qualité. Et hospitalité oblige, Oscar a tenu à nous raccompagner dans sa voiture : un des Maîtres du tango, d’un âge certain, au volant dans Buenos Aires, la nuit… Tout cela dans la plus grande simplicité et la meilleure convivialité. Inolvidable !
Moins intimidantes, mais tout aussi pitttoresques ont été les rencontres avec Elena de San Telmo, antiquaire spécialisée dans les revues, disques et autres documents originaux et authentiques sur les années brillantes du tango. Nous la connaissons depuis quelques années déjà : elle approvisionne, entre autres, les collections d’André Vagnon qui échange avec elle des raretés françaises contre des antiquités argentines du tango : voir mon article du 12/03/2016. Son magasin est à San Telmo, dans le mercado, et son bureau dans la Rue Bolivar, au dessus d’un bouquiniste. Nous l’avons rencontrée une première fois, entraînés par André qui lui a remis un paquet surprise, mais elle a manifesté le désir de nous revoir… et avait préparé un cadeau pour chacun d’entre nous : affiche ancienne de Gardel, partitions dédicacées, brochures en tirage limité sur des compositeurs … Encore un signe de la générosité argentine !
Enfin, lors de l’exposition organisée par Maria Rosa Braile à l’Ateneo, dont j’ai parlé dans un article précédent, nous avons croisé un peintre-danseur ou danseur-peintre, Guillermo Alio , qui travaille régulièrement à Caminito à La Boca, et qui est déjà venu en France, pour des cours avec Marina Caranza et Jean Ronald Tanham, et en 2015, pour une performance dans le cadre du Festival de Tarbes, où il peignait en dansant ! Vous pouvez voir cet événement sur You Tube et découvrir quelques-uns de ses tableaux sur internet. C’est un personnage chaleureux et pittoresque, qui doit cependant utiliser une partie de son temps pour peindre des oeuvres mineures pour touristes, devant le café tenu par son épouse… Il dessine habilement et avec virtuosité, à partir d’un prénom, d’un mot, d’une phrase, d’un croquis…. et il a tenu à exécuter et dédicacer pour nous une de ces petites saynètes dont il a le secret… Toujours la gentillesse, la disponibilité et l’hospitalité !
Comment ne pas aimer ce pays qui vous procure toutes ces rencontres fortuites et si enrichissantes, car chacune, dans son registre, nous parle du tango et de la culture ?