ITINERAIRE d’UN ENFANT GATE DU TANGO : 6 ) 2009, le marathon des Festivals…

Entre 2007 et 2009, dans la lancée de nos précédentes expériences, nous avons multiplié cours et rencontres, accumulant des enseignements sans toujours les assimiler. Non contents de travailler avec Robert et Raquel, nous avons jugé bon de participer à un « cours technique » proposé par Jean Ronald Tanham dont le savoir faire alliait rigueur et fantaisie, car s’il savait reprendre inlassablement la marche, les pivots, les changements de poids, il jouait aussi sur la théâtralité et l’improvisation. Les stages et les soirées avec lui et ses fidèles étaient toujours joyeux, chacun dansant à la mesure de ses possibilités et cela nous plaisait d’autant plus qu’un bar maison animait les conversations. Nous avions aussi retrouvé Catherine et Federico dans un stage prévu dans le cadre des Hivernales de Février 2008, à Avignon, enchaînant sans lassitude le cours « débutants » et celui des « intermédiaires » . Et … nous les avons retrouvés à Trielle en juillet 2008, avant d’autres activités. Vu rétrospectivement, cet excès de cours paraît ridicule, voir maladif : que cherchions nous ? une perfection inaccessible ? un regain de jeunesse ? la convivialité ? Je notais fébrilement les conseils et les figures apprises à chaque cours dans de jolis carnets Paperblanks que j’ai retrouvés et que je consulte pour ces étapes de mon blog, mais en relisant les compte rendus des cours, je m’apercevais que la transcription hésitante ne permettait pas toujours de retrouver les évolutions exactes que les vidéos nous fourniront plus tard quand les maestros concluront les séances en répétant les pas du jour. Heureusement, le voyage à Buenos Aires nous avait montré que, dans les milongas populaires, du moins, il fallait faire simple, notamment parce que la façon dont le bal tournait n’autorisait pas les figures compliquées. Et j’avais savouré, en dansant avec les Argentines, la façon discrète avec laquelle elles introduisaient des fioritures. Dans cette boulimie de cours, nous trouvions cependant un plaisir certain, celui de danser dans la convivialité des pédagogies diverses !

Encouragés par des amis, début janvier 2009, nous avons commencé à fréquenter « La Milonga del Angel » à Nîmes que Félix et France avaient été les premiers à ouvrir dans cette ville, en 1992, avec une ambiance proche des bals de la capitale argentine et l’ambition de populariser le tango avec les premiers cours du genre. La réputation de leur salle était et reste solidement établie et de bons danseurs s’y retrouvent régulièrement dans une atmosphère sympathique et des cours divers  y sont organisés. Le décor est sympathique avec une disposition qui permet « La mirada », un bon parquet et un petit bar bien achalandé . Et surtout, Félix et France s’en sont servi comme point d’ancrage  pour des activités culturelles : concerts, expositions, conférences, Festivals à Nîmes et au Pont du Gard. Le lieu reste encore aujourd’hui LA référence en matière de tango argentin à Nîmes et les danseurs leur doivent beaucoup parce qu’ils ont solidement ancré la danse dans le Sud. Plus tard, nous prendrons notre adhésion et nous gardons encore des liens avec France et Félix. Ce soir là, Andres et Julia Ciafardini étaient à l’oeuvre avec une pédagogie efficace, notamment en faisant travailler hommes et femmes séparément au début du cours, sur la posture et la marche. Avec ce premier cours avec eux, nous avons enrichi notre vocabulaire des figures ( « ganchito », « lapis »… ) sans pour autant bien les exécuter. Mais nous avons eu ensuite l’occasion de travailler à nouveau avec les maestros dans divers festivals, toujours avec l’envie de mieux faire.

     

   En mars 2009, Le Théâtre du Balcon, à Avignon, présenta une soirée « Tango Folie », avec une première partie intitulée « Tango Neruda » conçue par Serge Barbuscia, directeur, auteur, metteur en scène et acteur. Dans ce spectacle, l’auteur-acteur mettait en avant la situation d’exilé du grand poète et homme politique chilien pour en dire les souffrances mais aussi les passions, entre autres celles du tango et de la corrida, sur fond de musique de Piazzolla. Nous connaissions ce grand poète mais nous avons eu, ce soir là l’envie d’approfondir ses écrits… et de connaître son pays le Chili, rêvant de Valparaiso. Marina Carranza et Miguel Gabis dansaient sur certains morceaux et revenaient en scène, en seconde partie, avec un trio accordéon, contrebasse et piano. Ce spectacle a été repris plusieurs fois, dans les années suivantes, d’abord avec les mêmes danseurs,  qui donnèrent un stage préalablement – que nous suivîmes ! ! ! – puis avec des danseurs différents dont Jean Ronald. Je crois que je dois à cette soirée la prédilection que je garde pour Neruda, prix Nobel de littérature, dont je relus les mémoires « J’avoue que j’ai vécu » : elles figurent en bonne place dans la Bibliothèque que j’ai consacrée à l’Amérique latine et aux écrits qui touchent au tango. « ma vie est une vie faite de toutes les vies : les vies du poète » écrit-il dans son prologue des mémoires. Mais peut être avons nous surtout senti, ce soir là, que le tango n’était que la partie, momentanément visible pour nous, d’un univers culturel beaucoup plus vaste et riche que nous avions à découvrir et qui ne concernait pas que l’Argentine.

En mai 2009, nous avons vécu un Festival qui prenait de l’importance sous l’impulsion de Jean-François Auguy, à SAINT GENIEZ d’OLT dans l’Aveyron, village authentique, dans une superbe région de surcroît. Outre les plaisirs du tango, on pouvait prévoir ceux du tourisme et notamment, le dimanche, la Fête de l’Estive, rassemblement des bovins décorés avant de monter pour l’été à l’Aubrac, accompagné par des bergers mais aussi des marcheurs. En outre et en parallèle, le tango cohabitait avec un stage de Salsa qui apportait une autre ambiance dans les quelques rendez-vous communs. Nous nous sommes inscrits pour y retrouver Julia et Andres mais aussi pour travailler avec un nouveau couple que nous avions entrevu à Tarbes, l’année précédente, Joe Corbata et Lucila Cionci, et dont nous ne soupçonnions pas la réputation internationale naissante. Ce couple offrait une danse à la fois émouvante, esthétique et souvent spectaculaire, soigneusement travaillée. On trouve de nombreuses démonstrations de Joe et Lucila sur You Tube, dans le cadre des festivals auxquels ils ont participé dans le monde entier, mais je recommande celle de Valse, dans le cadre de l’Opéra de Bordeaux, en 2018 . Avec eux, nous visions haut, mais nous avons découvert dans leurs cours, une pédagogie bien rodée : en particulier, chaque séance débutait par un moment de décontraction qui consistait, tous les danseurs en rond, à détendre complètement le corps, sans bouger le moins du monde, même pas pour se gratter l’oreille ! Essayez et vous verrez que c’est à la fois difficile et efficace comme exercice de maîtrise de soi-même ! Je me souviens aussi que, au cours des stages avec les deux couples, nous avons beaucoup travaillé à nouveau le lapiz … sans toujours parvenir à l’élégance.

En juillet, sur incitation de Robert et Raquel, nous avons fait un tour au Festival de Menton, heureusement sans suivre de cours et juste pour la plaisir de danser dans des lieux sympathiques de la ville et d’assister à une belle démonstration du couple Rodolfo et Gloria Dinzel dont nous connaissions la notoriété portègne. Ils avaient en leur temps participé au spectacle « Tango Argentino » dont j’ai parlé dans l’étape 1 de notre itinéraire.En août, nous étions à nouveau au Festival de Tarbes, où nous avons retrouvé Lucila et Joe pour un cours technique, chacun de notre côté ! Mais nous avons aussi pris des cours avec un duo séduisant, Pilar Alvarez et Claudio Hoffmann qui travaillaient beaucoup sur la fluidité . Et découvert d’autres maestros, par ailleurs basés à Montpellier, Santiago et Erna, lui avec une démarche de chat, elle avec une expressivité dramatique toujours en tension. Tous  introduisaient de plus en plus la musicalité, mais Santiago et Erna consacrèrent un cours entier à l’écoute musicale en montrant comment on pouvait jouer sur le rythme, les accélérations, les pauses et les contretemps. Et il s’agissait aussi de trouver de ce fait la connexion complice qui permettait d’être en harmonie avec la partenaire, sans la déstabiliser en la surprenant. Ce travail nous a plu car il s’agissait de sentir et vivre la musique, travail que nous reprendrons plus tard avec Les Costa et avec Joachim Amenabar. Nous commencions à connaître quelques couples vedettes, souvent rencontrés au hasard des rues en toute simplicité dans un festival, manifestation toujours conviviale. En septembre, à quelques semaines de notre départ pour Buenos Aires, nous avons terminé l’été avec un autre Festival qui prenait de l’ampleur : celui d’Aix Les Bains. L’idée était de suivre Julia et Andres, Joe et Lucila, et rétrospectivement, je me rends compte que nous faisions preuve d’une belle santé, avec l’accumulation de 4 festivals en 4 mois ! Mais nous retrouvions aussi quelques autres couples qui couraient comme nous après l’inaccessible étoile ! Car à Aix, le festival animé par Doriane, et comme à Saint Geniez et Tarbes, avec l’appui de l’office du Tourisme, l’ambiance était aussi très amicale, grâce à son animatrice qui prévoyait plusieurs repas dansants. Aix possède tous les atouts d’une ville d’eau et notamment un casino où se déroulent les milongas. Et, comme à Tarbes, les bars sont impliqués pour des apéros tango, essaimant la danse dans toute la ville tandis que des manifestations culturelles, cinéma, expositions… agrémentent le programme. Tout cela il faut le souligner, grâce à la présence constante d’une belle équipe de bénévoles, entraînée par un ou deux animateurs et c’est souvent ce qui explique la longévité d’un festival où les danseurs aiment se retrouver. Peut être avons nous été inconsciemment séduits par ce fonctionnement que nous appliquerons plus tard quand nous intégrerons l’équipe de « Tango-Guinguette ».

Toujours est-il que, dopés par tant de rencontres ouvrant tous les possibles nous étions prêts pour un nouveau séjour en Argentine : nous avions prévu d’y conjuguer le tango, la découverte de la Capitale et d’une autre région du pays.

par chabannonmaurice

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