Une des premières années où nous étions en Argentine, à Cordoba, plus précisément en 2009, à la Milonga “El Arrabal” où nous ne connaissions personne, nous avons découvert et partagé la belle tradition qui consiste à profiter d’une soirée de bal pour y fêter son anniversaire ( cumpleanos en argentin, toujours invariable). C’était, ce soir là, une chanteuse du cru, Consuela, qui marquait le sien : habituée du lieu et figure locale connue des aficionados, elle faisait beaucoup pour la promotion du tango. Pour l’occasion, elle a chanté quelques tangos et dansé une zamba, danse que nous avons découverte avec bonheur. Un gigantesque gâteau attendait l’assemblée, après la tradition respectée avec entrain : les hommes devaient faire danser la valse à l’héroïne du soir. Par réserve dans un lieu nouveau, je n’ai pas osé me mêler à eux et le regrette encore. Par contre, nous n’avons pas refusé la part de pâtisserie distribuée à toute l’assistance. Et nous nous sommes immédiatement liés de conversation avec les tables voisines.
Depuis, nous avons eu l’occasion de participer à beaucoup d’anniversaires argentins et nous avons toujours eu la belle impression que nous étions de la famille. Le dernier en date, le 13 décembre dernier, au Club Gricel, marqué avec éclat à la Milonga “ Sueño Porteño” que j’ai déjà eu l’occasion de vanter, c’était celui de Blanca, 91 ans, une fidèle du lieu et de l’esprit de ce rendez vous bi-hebdomadaire, le mercredi et le dimanche. D’autres danseurs fêtaient aussi leur anniversaire, mais, ce soir là, Blanca fut l’objet de toutes les attentions. Toujours alerte de corps et d’esprit, elle n’hésita pas à danser, et notamment la milonga avec El Puchu, professeur de danse et animateur d’une Milonga au Dandy. Ce qui frappait, c’était l’attention respectueuse avec laquelle tous les habitués traitaient Blanca et en retour le regard pétillant de cette grande dame du tango.Une fois de plus, nous constations que les milongas argentines sont un rendez vous social et que les danseurs, s’ils en font un lieu où on peut aussi, manger, boire et rencontrer des amis, savent l’élire comme lieu de fête. En prenant soin de choisir les endroits où la convivialité est stimulée par l’hôtesse, comme c’est le cas avec Julia, pour “Sueño Porteño”.
Julia Doynel et Blanca, qui, un peu plus tard, découpent le gâteau décoré par les amis.
Cette tradition portègne est heureusement reprise par des organisateurs de milongas chez nous et, cette dernière semaine nous avons pu participer à deux événements de ce type. Le samedi 20 février à La Milonga del Angel à Nîmes, on a marqué l’anniversaire de Flavio Tagini autour d’un énorme gâteau confectionnée par son épouse Estefania, par ailleurs DJ de la soirée et grande amoureuse de l’Argentine. Mardi dernier 23 , c’était au tour de la Milonga hebdomadaire d’Abrazo social Club de fêter Sophie, sociétaire et par ailleurs animatrice de “Tabou Tango” à Uzès, qui a dansé la valse avec les hommes et, comme ils étaient nombreux, dans cette soirée bien fréquentée, Hélène, D.J. de la soirée a proposé un long “popurri”de valses argentines.
A la milonga d’Abrazo, comme chez Julia, photo de groupe autour de l’héroïne du jour.
Notons, pour finir, que la tradition de Cumplenaos tient une grande place dans la vie argentine, particulièrement pour les filles, pour lesquelles on marque solennellement la première et la quinzième année ( Fiesta de Quinceañera ). Dans le monde du tango on commémore volontiers le souvenir des grands disparus, comme en 2014, celui de Troilo. Quant à la revue “ B.A.Tango”, elle tient un calendrier trimestriel des anniversaires des événements et surtout des personnalités du tango. C’est ainsi que nous avons appris qu’en décembre Victor Lavallén, bandonéoniste et chef d’orchestre, et Susana Rinaldi, chanteuse et ambassadrice culturelle en France, ont passé avec vitalité le cap des 80 ans. Bon anniversaire!